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PRÉCIS DE DÉCISION ARBITRALE: À savoir si l’intimé a rempli ses obligations en vertu des règles de la DRC après avoir reçu une denrée en mauvaise condition

Nous poursuivons notre série de résumés de décisions arbitrales rendues antérieurement dans l’espoir que cela aide les membres à mieux comprendre comment fonctionnent les normes et règles de la DRC qui s’appliquent lors d’un différend. Ces règles stipulent notamment que tout arbitrage administré par la DRC doit demeurer privé et confidentiel. C’est pourquoi nous ne divulguons pas le nom des personnes, des arbitres ni des entreprises en cause. Nous vous rappelons en outre que la DRC n’agit qu’à titre d’administrateur du processus d’arbitrage; elle ne participe pas aux audiences. En conséquence, ces précis sont produits à partir des seules notes de l’arbitre ayant entendu le litige et peuvent ne pas inclure d’importantes informations ayant été révélées lors de soumissions écrites ou de dépositions orales.

 

Cause : Dossier de la DRC no 20042 – Les parties sont des États-Unis et du Canada.

Les faits :

  • Le réclamant a vendu à l’intimé 880 caisses de melons d’eau sans pépin du Guatemala. Selon la facture, le prix était de 10,75 $US la caisse FAB.
  • L’intimé a reçu l’envoi à Montréal le 16 mars 2015. Une inspection fédérale a révélé 0 % de pourriture, 2 % de cicatrices et 25 % de surmaturité, ce qui constitue un dommage grave.
  • Le 19 avril 2015, l’intimé a remis au réclamant une comptabilisation des ventes pour les 880 caisses qui comprenait trois différents prix : 275 caisses au prix de de 13,11 $US la caisse, 220 caisses à 11,48 $US la caisse et 385 caisses à 9,02 $US la caisse, pour un montant total des ventes de 9 602,46 $US. Après avoir déduit un montant de 5 295,24 $US pour les frais de transport et d’inspection et la commission, l’intimé a déclaré que la somme à remettre au réclamant s’élevait à 4 307,22 $US, que l’intimé a proposé d’arrondir à 4 400,00 $US

 

L’enjeu

À savoir si l’intimé a rempli ses obligations en vertu des règles de la DRC après avoir reçu une denrée en mauvaise condition.

 

Analyse et raisonnement de l’arbitre

Le différend tourne autour de la question suivante : Est-ce que l’intimé a rempli ses obligations en vertu des règles de la Corporation de règlement des différends dans les fruits et légumes dans sa manière de procéder à la vente des melons reçus du réclamant le 16 mars 2015? Cette question comporte plusieurs volets :

  • L’intimé a-t-il suivi les règles de la DRC relatives à l’inspection et au rejet?
  • L’intimé a-t-il « fait tout effort raisonnable pour écouler le produit aussi rapidement que possible dans les circonstances »?
  • Dans sa comptabilisation des ventes, l’intimé a-t-il rendu compte fidèlement et correctement des ventes du produit, y compris des « frais engagés à juste titre ou les autres frais de manutention de ces fruits et légumes expressément convenus »?

L’arbitre a répondu à ces questions dans ce même ordre :

  1. À savoir si les règles de la DRC concernant l’inspection et le rejet ont été suivies par l’intimé, il appert qu’une inspection a été demandée en temps opportun, que le nombre de caisses mises à la disposition de l’inspecteur de l’ACIA était approprié et que les résultats de l’inspection sont concluants. Le taux de 25 % de surmaturité excède de façon appréciable la tolérance maximale de 15 % prévue dans les règles de la DRC pour les problèmes d’état et constitue clairement un bris par l’expéditeur du contrat qui le lie à l’intimé. Une fois ce bris de contrat établi, l’intimé était donc en droit, avec ou sans l’accord du réclamant, de procéder à la vente de l’envoi pour recouvrer ses frais et remettre le solde au réclamant.

  

  1. À savoir si l’intimé a fait tous les « efforts raisonnables pour écouler le produit aussi rapidement que possible dans les circonstances, » la seule pièce justificative soumise par les deux parties à cet égard est le courriel du 25 mars de l’intimé informant le réclamant qu’il lui restait encore 200 caisses à ce moment-là. Avoir pu écouler 680 caisses de melons en mauvais état en l’espace de sept jours ouvrables conviendra à toute interprétation modérée de « tout effort raisonnable pour écouler le produit aussi rapidement que possible. »

 

  1. À savoir si l’intimé a rendu compte fidèlement et correctement des ventes du produit, y compris des « frais engagés à juste titre ou les autres frais de manutention de ces fruits et légumes expressément convenus », il faut examiner quatre principaux éléments : a. le prix de vente moyen; b. les frais de transport; c. les inspections; d. les commissions. Étant donné que l’exposé de la demande et les autres documents soumis par les parties dans ce différend ne faisaient aucune référence aux frais d’inspection ni aux commissions, l’arbitre n’a considéré que les résultats des ventes et les coûts du transport.

 

  1. En ce qui a trait aux ventes, le site Web InfoHort ne rapporte rien concernant le prix des melons d’eau sur le marché de Montréal durant la période où s’est déroulé la transaction. Pour le marché de Toronto, au mois de mars 2015, on ne relève rien concernant des melons du Guatemala. Par contre, le mini melon du Mexique y apparaît alors qu’on rapporte qu’il s’est transigé dans une fourchette de 18,00 et 23,00 $CAN (14,75 à 18,85 $US). La moyenne pondérée des prix rapportés par l’intimé s’établit à 13,31 $CAN pour l’ensemble des 880 caisses de cet envoi. Le prix de vente moyen de l’intimé représente 74 % de la valeur à l’extrémité inférieure de la fourchette de prix rapportée pour le marché de Toronto. De façon objective, il s’agit-là d’un très bon résultat étant donné le taux élevé de défauts révélé lors de l’inspection de l’ACIA. Le réclamant a mis en doute l’exactitude des trois échelles de prix de l’intimé et demandé une récapitulation détaillée de chacune des ventes liées à cet envoi. Selon les règles de la DRC, l’intimé n’a aucune obligation de fournir ce niveau de détails concernant ses ventes dans cette transaction qui a abouti en un bris de contrat par le réclamant. Quoique l’intimé eusse dû soumettre la date de sa dernière vente dans sa comptabilisation des ventes, l’arbitre a jugé qu’il s’agissait-là d’un manquement mineur et, tenant compte de tous les autres éléments, il a conclu que l’intimé s’était acquitté de ses obligations en vertu des règles de la DRC dans la vente de cette marchandise en état de détérioration avancée.

  2. En ce qui a trait aux coûts du transport, le réclamant semble avoir cru que la somme de 4 600,00 $US pour transporter le produit de la Floride à Montréal était excessive et a demandé une copie des factures du fournisseur de transport et du courtier en douanes de l’intimé. Ici encore, la demande du réclamant excède les dispositions des règles de la DRC, qui ne stipulent que les « frais engagés à juste titre ou les autres frais de manutention de ces fruits et légumes expressément convenus. » Étant donné qu’il s’agit d’une transaction où l’intimé a réclamé des dommages, et non d’une transaction en consignation ou en compte à demi, en vertu des règles de la DRC (et celles du PACA), l’intimé n’a aucune obligation de solliciter et obtenir l’accord du réclamant concernant aucun des éléments composant ses coûts. À l’exception de l’absence de la date de la dernière vente susmentionnée, l’intimé a fourni tous les renseignements requis. Si le réclamant avait des preuves pour soutenir ses prétentions concernant les coûts du transport, il aurait dû les présenter dans la documentation qu’il a soumise. Or, il n’en a présenté aucune. Voulant quand même aller au fond des choses, l’arbitre a consulté le Fruit and Vegetable Truck Rate Report de l’USDA pour la semaine se terminant le 17 mars 2015. Puisque le rapport ne mentionne pas les destinations canadiennes, l’arbitre a examiné les taux pour le transport du melon entre le sud de la Floride et Boston. La fourchette pour la semaine en question s’étendait de 3 450,00 à 3 800,00 $US. À partir de la limite supérieure de cette échelle, il a ajouté au prorata les 148 milles (238 km) séparant Chelsea de l’emplacement de l’intimé (une augmentation de 10,1% pour le trajet au complet). En extrapolant ainsi, il est ainsi arrivé à un coût de 4 183,37 $US pour le transport entre la Floride et le marché montréalais. En tenant compte des charges de courtage en douanes et de transit au moment de franchir la frontière internationale, l’arbitre n’a rien trouvé d’anormal ni d’excessif dans la comptabilisation des ventes de l’intimé. Aucun fait n’a été soumis à l’arbitre qui aurait pu lui permettre d’en arriver à une conclusion différente.

 

La décision arbitrale rendue :

La manière dont l’intimé s’est acquitté de ses responsabilités dans cette transaction – de l’inspection de l’ACIA à la vente rapide des melons et à la préparation de sa comptabilisation des ventes – était conforme aux règles de la DRC. La somme de 4 400,00 $US telle que déterminée dans la comptabilisation finale des ventes du 19 avril 2015 représente la pleine et entière responsabilité de l’intimé à l’égard de ce différend. L’intimé doit libeller un chèque au réclamant d’un montant de 4 400,00 $US en règlement complet et final de ses obligations envers le réclamant dans cette transaction. En conséquence, la réclamation du réclamant visant à obtenir un paiement additionnel de 3 303,81 $US est rejetée.

 

Commentaires de la DRC :

On ne peut mettre suffisamment d’emphase sur l’importance de suivre les procédures appropriées pour appuyer la réclamation de dommages lorsqu’un envoi arrive à destination en mauvais état ou ne correspond pas aux dispositions du contrat. L’intimé s’est conformé aux normes commerciales de la DRC en donnant avis du problème à l’arrivée dans un délai approprié, en demandant une inspection de l’ACIA dans un délai approprié, et en réclamant des dommages en soumettant au réclamant une comptabilisation des ventes montrant des ventes raisonnables ainsi que les déductions effectuées en raison du bris de contrat.

Les chances de connaître du succès en défense contre une réclamation augmentent de façon marquée lorsque les normes commerciales de la DRC ont été appliquées comme il faut.

Pour en savoir davantage sur les articles des normes commerciales de la DRC auxquels il est fait référence dans le présent précis, veuillez consulter :

Les normes commerciales de la DRC

 

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