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PRÉCIS DE DÉCISION ARBITRALE: À savoir si le réclamant a soumis sa demande dans les délais prévus à la limitation des réclamations (neuf (9) mois) et si l’intimé s’est acquitté de ses obligations en conformité avec les règles de la DRC après avoir reçu une denrée en mauvais état.

Nous poursuivons notre série de résumés de décisions arbitrales rendues antérieurement afin d’aider les membres à mieux comprendre comment fonctionnent les normes et règles de la DRC qui s’appliquent lors d’un différend. Les règles concernant le règlement des différends de la DRC (RRD) stipulent notamment que tout arbitrage administré par la DRC doit demeurer privé et confidentiel. En conséquence, nous omettons le nom des personnes, arbitres et entreprises en cause. Nous vous rappelons en outre que la DRC n’agit qu’à titre d’administrateur du processus d’arbitrage; elle ne participe pas aux audiences. Ces précis sont donc produits à partir des seules notes de l’arbitre ayant entendu le litige et peuvent ne pas inclure d’importantes informations ayant été révélées lors de soumissions écrites ou de dépositions orales.

Cause : Dossier de la DRC no 20568 – Les parties proviennent de l’Ontario et de la Saskatchewan au Canada

Les faits :

  • Le 7 mai 2019, le réclamant a vendu 600 caisses de tomates Beefsteak du Mexique à l’intimé.
  • Une facture datée du 15 mai 2019 indique que l’envoi a été vendu FAB à Laredo, au Texas, à un prix de 15,65 $US la caisse pour un montant total facturé de 9 570 $US. Les modalités de paiements étaient « net 30 jours », venant à échéance le 14 juin 2019.
  • L’intimé a pris possession de l’envoi à Laredo le 16 mai 2019 et l’a transporté à ses installations de Calgary, en Alberta, y arrivant le dimanche 19 mai 2019. Lors de sa réception à Calgary, une note a été portée au rapport à l’effet que l’envoi avait besoin d’être examiné pour la fermeté et la coloration afin d’en assurer le calibre. Aucun défaut n’a été relevé et nulle mention de tomates en détresse.
  • Le 21 mai 2019, l’intimé a envoyé un courriel au réclamant indiquant que la qualité des tomates baissait rapidement et qu’elles devenaient molles, ajoutant qu’il allait demander de faire inspecter ce qu’il avait.
  • Une inspection de l’ACIA a été demandée et réalisée le 21 mai 2019, montrant :

Le 21 mai 2019

Défaut

Moyenne

Marges

 

ferme et mûre

95%

 

 

 

(C) molle

6%

 

 

 

(C) pourriture

0%

0%

0%

 

(C) décoloration

4%

0%

10%

 

(C) surface molle

4%

0%

10%

 

(P) cicatrice

2%

0%

5%

 

(C) surface creuse

2%

0%

5%

 

  • Le 22 mai 2019, une seconde inspection de l’ACIA été demandée. Le rapport de cette deuxième inspection a montré une légère augmentation de tomates molles et ajouté d’autres variables qui n’apparaissaient pas dans le premier rapport. En outre, seulement 388 caisses ont été inspectées. Il présente les résultats suivants :

Le 22 mai 2019

Défaut

Moyenne

Marges

 

tournante

2%

 

 

 

à moitié mûre

1%

 

 

 

ferme et mûre

88%

 

 

 

(C) pourriture

1%

0%

5%

 

(C) décoloration

3%

0%

5%

 

(C) rupture de l’épiderme

1%

0%

5%

 

(C) molle

8%

0%

25%

 

(C) surface molle

6%

0%

15%

 

(C) surface creuse

3%

0%

5%

 

L’enjeu :

À savoir si le réclamant a soumis sa demande dans les délais prévus à la limitation des réclamations (neuf (9) mois) et si l’intimé s’est acquitté de ses obligations en conformité avec les règles de la DRC après avoir reçu une denrée en mauvais état.

Analyse et raisonnement de l’arbitre :

  1. Est-ce que la réclamation est recevable en vertu des règles de la DRC?

Selon les règles de la DRC :

Article 4        Limitation des réclamations

  • À moins que les parties n’en conviennent expressément par écrit, aucune réclamation contre un autre membre ne peut être soumise en vertu des présentes règles sans avoir préalablement été dûment notifiée à la DRC par un « avis de différend » dans un délai de neuf (9) mois, suivant le moment où la réclamation a pris naissance ou dans un délai de neuf (9) mois, suivant le moment où celui qui dépose la réclamation devrait raisonnablement en avoir pris connaissance. Le défaut de produire un tel avis de différend devant la DRC dans le délai prescrit est considéré comme un abandon de la réclamation et empêche le recouvrement auprès de l’autre membre.

La documentation ne montre aucun effort des parties à communiquer après le 28 mai 2019. Ni l’une ni l’autre n’a soumis de preuve d’échange de communications après cette date. 

L’intimé prétend que la période de limitation pour cette réclamation a débuté le 21 mai 2019, puisqu’il a demandé une inspection à cette date. Or, le fait de demander une inspection ne signifie aucunement que les parties ne peuvent parvenir à régler l’affaire entre elles. Il n’y avait aucune évidence que la facture n’allait pas être payée. Combien de temps une entreprise devrait-elle essayer de recouvrer une facture avant qu’elle puisse raisonnablement savoir qu’elle ne sera pas payée? Dans notre secteur, on considère raisonnable un règlement qui peut prendre des mois.

La date de la facture étant le 14 juin 2019, la période statutaire aurait débuté le 15 juin 2019.

Le réclamant a soumis sa réclamation à la DRC le 9 mars 2020, soit à l’intérieur du délai de neuf mois. Comme la réclamation a bel et bien été soumise dans les délais prescrits, l’arbitrage peut se poursuivre.

  1. Le réclamant a-t-il présenté une cause valable contre l’intimé pour récupérer ses dommages?

La réclamation indique que l’intimé a acheté les tomates du réclamant. L’intimé les a envoyées à Calgary, en Alberta.  Le rapport produit à l’arrivée qu’a reçu l’intimé indique que les tomates sont arrivées à 7h18 le dimanche 19 mai 2019. Le rapport indique également que les tomates doivent être reclassées en raison de la décoloration et du manque de fermeté. À part cette note, il n’y a aucune évidence de problème avec les tomates. Si les tomates se détérioraient, une inspection aurait pu être demandé dès leur arrivée le dimanche matin.

Deux jours plus tard, l’intimé communique avec le réclamant pour lui dire qu’il y a un problème avec les tomates. Il fait faire une inspection cette journée-là et une autre le lendemain. Le premier rapport d’inspection révèle un taux total de défauts de 18 %.

Au Canada, en l’absence d’accord sur une catégorie, ce sont les directives sur l’arrivage de marchandises de la DRC qui s’appliquent par défaut.

Les directives sur l’arrivage de marchandises de la DRC

Tomates

15 – total de défauts tolérés

10 – total de défauts permanents tolérés

5 – total de défauts permanents particuliers tolérés

10 – total de défauts d’état particuliers tolérés

5 – taux de pourriture maximal toléré

Ainsi, deux jours après leur arrivée à destination, les tomates ne rencontrent pas les exigences des directives sur l’arrivage de marchandises de la DRC, mais par seulement 2 % (les défauts permanents comme les cicatrices ne comptent pas lorsqu’aucune norme de catégorie n’est convenue). Les tomates auraient-elles rencontré les exigences des directives sur l’arrivage des marchandises de la DRC si elles avaient été inspectées dès leur arrivée?

La documentation soumise ne présente aucune communication entre les parties concernant la transaction ou le paiement qui aurait pu avoir lieu par la suite.

En outre, bien que l’intimé ait déclaré que le produit était défectueux et ne rencontrait pas les exigences, il n’a produit aucune documentation concernant sa disposition. Il déclare qu’une partie de l’envoi a dû être mise aux rebuts, mais ne présente aucune documentation étayant cela. Et qu’est-il arrivé au reste des tomates? Là encore, aucune documentation en soutien à sa comptabilisation limitée.

C’est clair que l’intimé a acheté les tomates du réclamant. La facture n’a pas été contestée. Sans égard aux autres enjeux, l’intimé n’a pas réussi à prouver sa cause. Aucune preuve des températures de transit dans cette vente FAB n’a été soumise. Une inspection deux jours après leur arrivée ne dépasse que très marginalement les tolérances et diffère considérablement du rapport de réception. Et finalement, comme mentionné précédemment, la disposition des tomates n’est pas documentée de manière appropriée.

En ce qui a trait à l’implication du client de l’intimé, il y a peut-être eu une entente séparée pour cet achat. Cependant, sa participation n’a pas été bien expliquée et n’a pas constitué un facteur majeur dans la décision. L’intimé a déclaré « qu’on lui avait dit » d’effectuer l’achat des tomates.

La décision arbitrale rendue :

Décision en faveur du réclamant d’un montant de 10 248 $US – 9 570 $US plus les frais d’arbitrage de 678 $US – payable dans les 30 jours.

Commentaires de la DRC :

Les membres de la DRC doivent observer la limitation des réclamations prévue aux règles concernant le règlement des différends de la DRC. En vertu de celles-ci, le membre de la DRC doit soumettre son avis de différend dans un délai de neuf (9) mois suivant l’apparition du différend. Ainsi les dates suivantes peuvent être prises en considération pour déterminer si la réclamation est survenue à l’intérieur du délai prescrit :

  • Les dates de facturation
  • Les modalités de paiement
  • La date de notification d’une réclamation
  • La date qu’un retour a été effectué ou qu’un rapport de liquidation a été soumis
  • La date à laquelle les négociations ont pris fin

Il incombe aux parties de soumettre leurs arguments quant à la date où le différend a débuté selon elles.

Même quand le produit arrive le weekend ou un jour férié, l’acheteur ou le destinataire peut faire une demande d’inspection gouvernementale. De toute manière, une fois qu’un geste d’acceptation a été posé, comme décharger l’envoi et libérer le camion, le temps se met à compter pour qu’une inspection soit réalisée dans un délai approprié.

Un enjeu qui a été complètement évacué par l’arbitre, ce sont les spécifications du client de l’intimé. L’intimé aurait pu réussir à prouver que ces spécifications faisaient partie du contrat s’il avait pu démontré par le biais d’un contrat ou d’une communication que ces spécifications avaient été discutées, comprises et convenues.

Pour en savoir davantage sur les articles des normes commerciales de la DRC qui sont applicables à ce différend, veuillez consulter les références suivantes :

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