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PRÉCIS DE DÉCISION ARBITRALE: À savoir si la somme retournée par l’intimé est déraisonnable ou non

Nous poursuivons notre série de résumés de décisions arbitrales précédemment rendues. Ces précis aident les membres à mieux comprendre le fonctionnement des règles concernant le règlement des différends de la DRC qui s’appliquent lors d’un différend. Ces règles stipulent notamment que tout arbitrage administré par la DRC doit demeurer privé et confidentiel. En conséquence, nous omettons le nom des personnes, arbitres et entreprises en cause. Nous vous rappelons en outre que la DRC n’agit qu’à titre d’administrateur du processus; elle ne prend pas part aux audiences. Ces précis sont donc produits à partir des seules notes de l’arbitre ayant entendu le litige et peuvent ne pas inclure d’importantes informations ayant été révélées lors de soumissions écrites ou de dépositions orales.

Cause : Dossier de la DRC no 13145 – Parties provenant des États-Unis et du Canada

Les faits :

  • Autour du 8 mars 2003, le réclamant a vendu et expédié à l’intimé un envoi de 1344 caisses de poivrons rouges comprenant des poivrons de marque X (moyen et gros), de marque Y (moyen et gros) et de marque Z (moyen).
  • Selon la facture, le réclamant a vendu ses poivrons FAB à 12,95 $US la caisse et a facturé 23,50 $US pour un thermographe portant le prix total de la facture à 17 428,50 $US.
  • Les poivrons sont arrivés à destination le 13 mars 2003 et une inspection de l’Agence d’inspection des aliments a été demandée et réalisée ce même jour, avec les résultats suivants :

448 caisses – Marque X, moyen
1% de cicatrices, 7% de meurtrissures, 1% de pourriture de la partie comestible, 9% de texture molle ou ratatinée.
224 caisses – Marque X, gros
8% de meurtrissures, 1% de pourriture de la partie comestible, 8% de texture molle ou ratatinée.
280 caisses – Marque Z, moyen
17% de meurtrissures, 4% de texture molle ou ratatinée.
98 caisses – Marque Y, moyen
1% de cicatrices, 4% de meurtrissures, 2% de pourriture de la tige, 2% de pourriture de la partie comestible, 8% de texture molle ou ratatinée, 2% de taches creuses décolorées.
294 caisses – Marque Y, gros
1% de cicatrices, 6% de meurtrissures, 1% de pourriture de la tige, 3% de pourriture de la partie comestible, 7% de texture molle ou ratatinée.

  • Le 21 mars 2003, l’intimé a fourni une comptabilisation des ventes au réclamant montrant un total de 12 248,09 $US et 19 229,50 $CAN, déduisant des dépenses totalisant 4 792,92 $US (manutention, transport, frais d’inspections et frais d’entrée) pour un retour total au réclamant de 7 455,17 $US.
  • L’intimé a payé le réclamant la somme apparaissant à la comptabilisation des ventes. Le réclamant a manifesté son désaccord, arguant que le montant retourné était déraisonnablement trop bas.

L’enjeu : Déterminer si la somme retournée par l’intimé était raisonnable.

Analyse et raisonnement de l’arbitre :
L’arbitre n’a relevé aucun désaccord entre les parties concernant les dispositions du contrat original, ni de contestation de la part du réclamant quant aux résultats de l’inspection montrant un bris de la garantie d’arrivage convenable. Le réclamant a toutefois argué que les prix de vente rapportés par l’intimé étaient trop bas, considérant l’état des poivrons et les conditions générales du marché. Les deux parties ont été questionnées à savoir si les dispositions contractuelles originales avaient été modifiées d’un commun accord et l’arbitre a conclu que les dispositions du contrat original n’avaient pas changées. Par conséquent, l’arbitre a déterminé le montant des dommages-intérêts auxquels le demandeur avait droit en vertu de la rupture de contrat de l’intimé.

La formule habituelle pour déterminer le montant des dommages est de déterminer ce qu’aurait obtenu le destinataire des poivrons en mauvais état au moment de leur arrivée à destination (en s’appuyant généralement sur les rapports gouvernementaux donnant des nouvelles du marché), moins la somme qu’a reçue le destinataire en revendant rapidement et promptement les poivrons endommagés. Dans ce cas-ci, l’arbitre s’est référé comme source la plus crédible des prix du marché à The International Report Fresh Fruit, Vegetable and Ornamental Crops [2]; Volume XII – Numéro 21, qui montrait des prix pour les gros poivrons rouges oscillant entre 22,50 $US et 27,66 $US sur le marché de Montréal le 14 mars 2003. Le réclamant s’est référé à des rapports censément publiés à ces fins par l’« International Office of Market News » mais n’a pas offert de copies de ces prix ni d’informations au sujet de cette entreprise. L’arbitre a utilisé les prix du 14 mars puisque l’inspection a été complétée à 13h10 le 13 mars, après que la plupart des ventes de la journée aient déjà été conclues. La comptabilisation des ventes de l’intimé montre que la vente des poivrons a débuté le 14 mars, ce qui est en conséquence conforme à la définition de « au moment de la livraison. »

Le réclamant a décrit les poivrons en cause comme des « choppers », c’est-à-dire des poivrons qui ne sont généralement pas de la plus haute qualité et ne commandent pas les prix les plus élevés du marché. En outre, les prix du marché portent sur les gros poivrons alors que le différend porte également sur 826 caisses de poivrons de taille moyenne. Pour ces raisons, l’arbitre a utilisé un prix de 22,50 $US pour déterminer la valeur que des denrées conformes auraient eu au moment de la livraison. Cela donne un montant de 30 240.00 $US pour les 1344 caisses de poivrons.

La meilleure mesure de la valeur qu’avaient réellement les poivrons en cause demeure le résultat obtenu de la revente prompte et rapide. La comptabilisation de l’intimé montre que les ventes ont débuté rapidement dès le 14 mars et se sont poursuivies chaque jour jusqu’au 20 mars. Le prix réalisé a varié entre 17,50 $CAN à 12,00 $CAN, ce qui se traduit par 11,15 $US et 7,64 $US. En outre, l’arbitre n’a pas relevé de mauvaise manutention, malgré le défaut du produit à rencontrer pas la garantie d’arrivage convenable. En général, une mauvaise manutention peut être confirmée par des délais à démarrer les ventes, des ventes de très grandes quantités à très bas prix ou des périodes de vente d’une longueur extrême. Aucun indice de tels comportement ici. En conséquence, l’arbitre a jugé que la valeur des poivrons en cause s’établissait aux recettes brutes rapportées par l’intimé, soit 12 248,09 $US,

Les dommages de l’intimé subis en raison du bris de contrat par le réclamant s’établissent à la valeur tirée de la vente des denrées si elles avaient été reçues en bon état (30 240,00 $US) moins la valeur actualisée des denrées reçues (12 248,09 $US), soit 17 991,91 $US. En sus de ce montant, les coûts d’inspection (132,99 $US) sont imputables puisqu’ils ont été encourus en raison du bris de contrat. Le montant total des dommages s’établit donc à 18 124,90 $US. Comme les dommages excèdent le montant original de la facture, l’arbitre conclut que l’intimé ne doit aucun montant au réclamant.

À titre de note, il convient de mentionner que même si l’arbitre avait recouru aux prix publiés par l’International Office of Market News pour la période du 10 au 14 mars 2003, comme le lui demandait le réclamant, il serait arrivé au même résultat. En utilisant le prix le plus bas de 16,66 $US, il aurait eu encore moins de raisons de questionner la comptabilisation de l’intimé, et les dommages auraient totalisés 10 275,94 $US. Ce montant, déduit de la facture de 17 404,80 $US aurait laissé un solde de 7 128,86 $US. L’intimé avait déjà payé 7 404,80 $US.

La décision arbitrale rendue :
L’arbitre a conclu que le réclamant n’a pu établir que le retour payé par l’intimé était déraisonnablement bas. En conséquence, il a rejeté la réclamation.

Commentaires de la DRC :
Il n’est pas rare de trouver des causes où il n’y a pas de désaccord entre les parties concernant l’état de détérioration des produits à l’arrivée lorsqu’une inspection gouvernementale a été réalisée en temps opportun et a confirmé le bris de contrat. Le désaccord est normalement lié au retour offert par l’acheteur qui peut ou non inclure une comptabilisation des ventes montrant comment le produit a été manutentionné.

Cette décision arbitrale met en lumière l’importance pour l’acheteur ou destinataire de soumettre une comptabilisation de ses ventes montrant la date, le prix et le montant pour la vente de chaque lot, ainsi que les charges encourues en raison du bris de contrat qui comprennent le transport, les frais de courtage, les frais d’inspection et toute autre charge mutuellement convenue.

Sans une comptabilisation des ventes appropriée, un arbitre pourra recourir à un différent moyen d’établir ce qui pourrait constituer un retour équitable.

L’arbitre a conclu à partir de l’inspection au moment opportun qui a confirmé le bris de contrat, de la comptabilisation des ventes détaillées et des prix observés sur le marché que les prétentions de l’intimé étaient raisonnables.

Pour en savoir davantage au sujet des articles des normes commerciales de la DRC applicables à ce différend, veuillez consulter les références suivantes :

Les normes commerciales de la DRC :
• Obligations du destinataire – (Normes commerciales de la DRC, art. 10 2.(b)(ii))
• Retour à la base : compte de ventes – (https://fvdrc.com/fr/solutions/retour-la-base-compte-de-ventes/)

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